Immunité anti-tumorale
I. Définition :
C’est
l’étude des phénomènes immunitaires qui se produisent chez l’hôte d’une
tumeur spontanée ou provoquée expérimentalement, que ces phénomènes
tendent à inhiber ou à protéger le développement de la tumeur.
Elle
implique l’existence de structures antigéniques propres aux cellules
malignes et absentes des cellules normales du même tissu chez un animal
sain au même stade de son développement, et postule que ces antigènes
provoquent une réaction immunologique efficace permettant le rejet de la
tumeur comme celui d’une greffe allogénique. En conséquence, les
problèmes de l’immunologie des tumeurs sont ceux posés par l’immunologie
des allogreffes.
II. Antigènes des tumeurs :
1) Définition et nomenclature :
Toute
structure de la cellule maligne absente des cellules saines du même
tissu au même stade de développement et susceptible d’entraîner une
réaction immunitaire soit chez l’hôte, soit par inoculation à un hôte
étranger, peut être considérée comme antigène de tumeur.
Ces
antigènes de tumeurs constituent la cible théorique de la réaction
immunitaire anti-tumorale grâce à laquelle l’organisme semble se
défendre.
Les
antigènes de tumeurs sont désignés de façon très variable en fonction
des systèmes et des espèces animales mais quelques termes généraux
doivent être connus :
· le terme de néoantigène anciennement usité doit être abandonné
· TSA
(Tumor Specific Antigen) : ce sont des antigènes rarement rencontrés et
apparemment spécifiques de la cellule maligne, c’est-à-dire totalement
absent des tissus normaux adultes ou embryonnaires. Quand ils sont
exprimés à la surface de la cellule et qu’ils sont capable d’entraîner
une réaction de rejet, on les désigne par les initiales TSTA (Tumor
Specific Transplantation Antigen)
· TAA (Tumor Associated Antigen) :
ne sont pas réellement spécifiques de la cellule maligne et peuvent se
trouver dans certains cas, présents aussi sur des cellules embryonnaires
ou sur des cellules infectées par certains virus oncogènes. Ils sont
désignés par les initiales TATA (Tumor Associated Transplantation
Antigen) quand ils sont exprimés à la surface cellulaire et impliqués
dans le rejet de la dite tumeur.
2) Localisation :
a) Les antigènes de la surface cellulaire
Cette
catégorie d’antigène est importante pour le rejet des tumeurs, car ce
sont les seuls accessibles aux effecteurs du rejet (Ac et/ou cellules
lymphoïdes). Certains de ces antigènes sont aptes à entraîner le rejet
immunologique de la tumeur qui les porte (TSTA ou TATA). Sur le plan
moléculaire, les TSTA et les TATA sont des peptides, issus de protéines
exprimée par la cellule tumorale, et le plus souvent présentés dans le
contexte des molécules d’histocompatibilité de classe I de l’hôte. Ils
sont fréquemment le produits de protéines ayant subi des mutations
somatiques ; c’est le cas des premiers antigènes tumoraux identifiés en
utilisant les cellules P815 de mastocytome. Ils peuvent être également
le produit de gènes qui ne s’expriment pas dans les cellules normales
(gènes silencieux) et qui se réactivent dans les cellules tumorales, le
produit d’oncogènes activés ou encore de rétrovirus endogènes. Enfin
certains antigènes tumoraux sont des protéines embryonnaires, exprimées
uniquement à certains stades précoces du développement de l’embryon,
lorsque le système immunitaire n’est pas totalement développé, ce qui
explique l’absence de tolérance, chez l’individu adulte, vis-à-vis de
ces protéines.
b) Les antigènes intracellulaires :
Ils
sont localisés dans le noyau ou le cytoplasme. Ces antigènes ne sont
donc pas concernés par le rejet de la cellule maligne mais peuvent
constituer des marqueurs importants de la malignité.
c) Les antigènes solubles :
Les
antigènes de la membrane comme les antigènes intracellulaires peuvent
être libérés dans le milieu extérieur et constituer alors des antigènes
solubles que l’on pourra retrouver dans la circulation ou dans le
surnageant de culture.
3) Méthodes utilisées pour leur identification :
Etant
donnée la très faible immunogénicité des cellules tumorales, la mise au
point d’outils (lyT ou Ac) à la fois sensibles et spécifiques
permettant d’aller identifier des Ag tumoraux a été extrêmement
laborieuse. Du fait de l’importance des lyT CD8+ cytotoxiques en
immunité anti-tumorale, la plupart des travaux initiaux se sont
concentrés sur l’identification des peptides antigéniques présentés par
les molécules du CMH de classe I aux cellules T spécifiques isolées à partir de souris ou de patients porteurs de tumeurs.
a)
Une première approche de génétique moléculaire a utilisée la
transfection de librairies d’ADN complémentaire (ADNc) de tumeurs dans
des cellules qui exprimaient les molécules du CMH de classe I adéquates.
Les cellules transfectées sont alors testées pour leur aptitude à
stimuler des clones lymphocytaires T cytotoxiques spécifiques. On a pu
ainsi identifier des gènes codant pour les Ag tumoraux reconnus par ces
clones lymphocytaires T. En un deuxième temps, grâce à l’utilisation des
cellules transfectées uniquement avec des fragments de gènes
identifiés, il a été possible de définir les régions codant pour les
peptides antigéniques. Enfin, sur la base des séquences obtenues, des
peptides synthétiques ont été produits et testés pour leur capacité à
sensibiliser les CPAg (portant les molécules CMH adéquates) à la lyse
par les Ly Tc spécifiques.
b)
Une deuxième approche a concerné la purification biochimique par HPLC
(chromatographie liquide haute résolution) des peptides naturels élués à
partir des molécules d’histocompatibilité de classe I exprimés par les
cellules tumorales. Les différents peptides élués ont été testés, comme
précédemment, pour leur aptitude à stimuler la capacité fonctionnelle
des cellules T spécifiques. Une fois identifiés, ces peptides sont
séquencés, produits sous forme synthétiques et testés pour leur capacité
fonctionnelle. Cette démarche est particulièrement adaptée dans le cas
des protéines ayant subi des modifications pos-traductionnelles, pour
lesquelles la séquence du peptide ne peut pas être déduite directement à
partir de la séquence de l’ADNc
c)
Enfin, une troisième méthode fondée sur l’utilisation des anticorps
présents dans le sérum de patients présentant des tumeurs a été
développée. Il s’agit d’établir des banques d’expression d’ADNc à partir
d’ARNm isolés de tumeurs fraîches. Les banques sont ensuite criblées à
l’aide de préparations d’anticorps IgG provenant des patients porteurs
des mêmes tumeurs ayant servies à l’isolement des ARNm. Les protéines
antigéniques tumorales ainsi identifiées par sérologie sont ensuite
testées pour leur capacité à être apprêtées et présentées à des Ly T
CD8+ ou CD4+ spécifiques.
4) Nature des antigènes des tumeurs :
On peut distinguer 4 grands types d’antigènes de tumeurs :
a) Les antigènes viro-induits :
Ils
sont retrouvés sur les tumeurs induites par les virus oncogènes à DNA
(virus polyome, virus simien SV40, adénovirus humains, virus oncogènes
de type herpès saïmiri, Marek) ou à RNA (leucémies et tumeurs
hématopoïétiques diverses chez de nombreuses espèces de vertébrés -
poulet, souris, chat- Tumeurs mammaires chez certaines espèces.).
Les
antigènes correspondants aux tumeurs viroinduites sont entièrement
dépendants (codés) du génome viral, et par conséquent sont identiques
d’une tumeur à l’autre quand le même virus est en cause chez des animaux
de la même espèce ou d’espèces différentes.
b) Les antigènes individuels de tumeurs (chimioinduits)
Ces
antigènes sont surtout connus dans des systèmes expérimentaux de
tumeurs induites par des carcinogènes chimiques comme les sarcomes
induits par le méthylcholanthrène (MCA) chez la souris.
Ils
sont propres à une tumeur donnée d’un individu donné et ne se
retrouvent pas sur d’autres tumeurs induites dans la même espèce et dans
la même souche par le même carcinogène. Ces antigènes sont peu
immunogènes.
c) Les antigènes oncofoetaux (ou carcinoembryonnaires)
Ce
sont des substances normalement présentes chez l’embryon, à un stade
donné de son développement, mais absentes chez l’adulte ou n’y
persistant qu’à l’état de traces. Leur réapparition dans les tumeurs
semble être un phénomène très répandu (voire universel). Parmi les
antigènes les plus connus en clinique humaine, on peut citer l’alpha-1
foeto-protéine (a1FP)
des cancers primitifs du foie, et l’antigène carcinoembryonnaire (CEA)
des tumeurs du colon. Il s’agit d’antigènes de très faible
immununogénicité qui ne semblent déclencher que des réactions mineures
chez l’hôte.
d) Les antigènes de différenciation associés aux tumeurs.
La surface cellulaire subit d’importantes modifications au cours de la différenciation, non seulement chez l’embryon, mais
encore chez l’adulte dans tous les tissus. L’existence de ces antigènes
a été démontrée dans certaines tumeurs comme par exemple l’antigène TL
de certaines leucémies de souris (l’Ag TL est un antigène de
différenciation thymique qui disparaît des thymocytes lorsqu’ils sont
mis en circulation). C’est le cas, chez l’homme, de l’Ag CD10 (ou
CALLA :common acute lymphoblastic leukemia antigen). Cet antigène est
exprimé sur les thymocytes et les cellules B de la moelle osseuse mais
pas sur les lymphocytes périphériques. L’Ag CD10 est exprimé sur des
cellules malignes dans la majorité des leucémies lymphoblastiques.
III. Réactions immunologiques anti-tumorales :
1) Mise en évidence d’une immunité anti-tumorale :
Expérience de Foley en 1953
· Induction d’une tumeur par le méthylcholanthrène en s/c chez une souris de lignée C3H
· Production d’un fibrosarcome entretenu par passage sur d’autres souris de la même lignée.
· Ligature de la tumeur à sa base ; la nécrose de la tumeur est observée
· Réinoculation, 3 semaines après, de la même tumeur à la même souris C3H chez laquelle on a ligaturé la première tumeur induite par le méthylcholanthrène
· Pas de développement de tumeur, c’est-à-dire qu’il y a rejet des cellules tumorales ré-inoculées.
· En utilisant 6 tumeurs chimio-induites différentes, Foley démontre qu’il existe une spécificité anti-tumorale de cette immunité.
Cette
immunité est liée à l’existence d’antigènes à la surface des cellules
tumorales (TSTA). Cette immunité est transférable d’un animal à un
autre. Le transfert des anticorps est d’une efficacité modeste. Par
contre le transfert passif de l’immunité anti-tumorale par des
lymphocytes à un receveur tolérant peut entraîner des protections
efficaces contre la greffe ultérieure d’une tumeur de même antigénicité.
2) Immunité humorale anti-tumorale :
a) Cas des tumeurs expérimentales :
Chez
le porteur de tumeur expérimentale, des anticorps cytotoxiques en
présence de complément sont mis en évidence in-vitro . Ces anticorps
pourraient jouer un rôle in-vivo, dans la destruction des cellules
tumorales. Beaucoup plus souvent encore, ce sont des anticorps qui ne
fixent pas le complément et donc sont dépourvus d’action cytotoxique
in-vitro, qui sont mis en évidence. Cette deuxième catégorie d’anticorps
peut intervenir in-vivo par ses effets d’opsonines ou en faisant
intervenir les cellules K.
Enfin,
ces anticorps pourraient être nocifs pour l’hôte en bloquant tous les
sites cellulaires antigéniques et en empêchant ainsi l’accès à la tumeur
des cellules lymphoïdes T effectrices (cytotoxiques).
b) Cas des tumeurs humaines :
Chez
l’homme, des anticorps anti-tumoraux ont été signalés dans de
nombreuses tumeurs. Ainsi, on peut mettre en évidence, chez le porteur
de lymphome de Burkitt et de cancer des fosses nasales postérieures, des anticorps qui existent également dans la population normale, mais à des taux beaucoup plus élevés chez les malades. Trois types de spécificités peuvent être distingués :
·Ac contre des antigènes intra-cytoplasmiques : anti-VCA (viral capside antigen) et anti-EA (early antigen)
·Ac anti-EBNA (Epstein-Barr nuclear antigen) très caractéristiques des cellules malignes
·Ac anti-MA (membrane antigen) caractéristiques du virion et de la cellule maligne.
c) Rôle des anticorps dans le rejet
Ce rôle reste difficile à affirmer ; il est encore hypothétique dans le rejet de tumeurs.
3°) Immunité cellulaire anti-tumorale :
a) Technique de mise en évidence :
· TTL en présence de cellules tumorales isologues ou autologues
· MIF par l’antigène tumoral
· HSR cutanée à l’antigène tumoral
Ces 3 tests ne traduisent pas nécessairement une réaction de rejet
· Test de cytotoxicité en microplaque
· Test de relargage du chrome 51 (CRT : chromium release test) par les cellules tumorales en présence de lymhocytes immuns.
Ces 2 derniers tests explorent les réactions de rejet.
b) Cellules capables de détruire les cellules tumorales chez le porteur de tumeur :
Il
est bien établi actuellement que la réaction à médiation cellulaire est
en fait très complexe et met en jeu des effecteurs de nature multiple.
L’induction de la réponse immunitaire spécifique nécessite l’activation
des lymphocytes Th CD4+
· des cellules thymodépendantes cytolytiques (CTL) analogues à celles détectées par le CRT
· des cellules tueuses (killer ou K-cells) agissant par l’intermédiaire d’anticorps (ADCC : antibody dependant cell cytolysis)
4) Immunité naturelle anti-tumorale :
L’existence
d’une immunité naturelle anti-tumorale s’appuie sur de nombreux
arguments indirects. La prévalence de tumeurs spontanée n’est pas plus
élevée chez les souris athymiques (nu/nu) que chez les témoins normaux .
L’activation des macrophages par différentes molécules d’origine
bactérienne (lipopolysaccharides, lipopeptides, muramyl-dipeptide) peut
entraîner une régression tumorale dans différents modèles expérimentaux
de tumeurs transplantables.
Trois types de cellules participent à cette immunité naturelle anti-tumorale :
· les
lymphocytes NK sont susceptibles de lyser in-vitro des lignées
tumorales ayant une expression faible ou nulle des molécules du CMH
· les
cellules LAK, obtenues par culture de lymphocytes du sang en présence
d’IL-2 sont susceptible de lyser in-vitro des cellules dissociées à
partir de certaines tumeurs.
· les macrophages activés in-vitro par des cytokines (IFNg)
sont susceptible de lyser in-vitro des cellules tumorales. La
spécificité des interactions moléculaires impliquées dans cette réaction
cytotoxique est inconnue. Le TNFa produit par les macrophages activés est capable de détruire par apoptose de nombreuses lignées de cellules cancéreuses.
· les
éosinophiles activés par l’IL-5 et différents médiateurs, ont une
puissante activité cytotoxique vis-à-vis de tissus normaux et de
parasites, qui peut s’étendre aux cellules tumorales.
IV. Schéma général des phénomens d’immunité anti-tumorale IN-VIVO:
On peut proposer le schéma suivant pour expliquer les mécanismes mis en jeu dans le rejet des tumeurs.
1) Reconnaissance des cellules tumorales par des macrophages : et
peut-être aussi par les cellules T Il est possible qu’à ce stade, les
macrophages puissent détruire de façon non spécifique les cellules
tumorales (activité in-vivo ? ?).
2) La reconnaissance de la tumeur :
déclenche la réponse immunitaire avec génération de cellules
cytolytiques (CRT) qui vont intervenir directement sur la cellule
tumorale cible. Ces cellules T cytolytiques sont faciles à mettre en
évidence lors des tumeurs expérimentales viro-induites et pourraient
jouer un rôle dans l’immuno surveillance.
3) La réaction cytolytique due aux cellules T : est relayée ou renforcée
et complétée par d’autres réactions. La synthèse d’Ac joue alors sans
doute un rôle essentiel à ce stade avec cependant 2 possibilités :
· Ac relativement puissants : protection contre la réapparition de la tumeur quand la réaction T initiale a été efficace,
· Ac faibles mais encore efficaces grâce au phénomène d’ADCC (K ou macrophage),
· Réaction
macrophagique non spécifique : il existe fréquemment au sein de la
tumeur en voie de rejet, des macrophages activés au voisinage des
cellules T,
4) Activité cytotoxique anti-tumorale naturelle :
on a pu démontrer l’existence de « réactions anti-tumorales non
spécifiques chez de nombreux sujets normaux. Cette activité est due à
des cellules qui ne sont ni T ni B appelées cellules NK (natural
killer). A la différence des CTL, les cellules NK ne sont pas douées de
spécificité immunologique. Il semble que les cellules NK n’agissent
surtout que sur les cellules tumorales ; l’IFNg
stimulerait cette action, tout en protégeant les cellules normales
saines. Les cellules NK pourraient, par ce mécanisme, jouer un rôle très
efficace dans l’immunosurveillance dirigée contre les cellules malignes
et les cellules infectées par des virus.
V. Mécanismes d’échappement des tumeurs au contrôle immunologique :
1) Par absence totale d’antigénicité
· Les
tumeurs viro-induites ou chimio-induites sont rarement dépourvues
d’antigénicité. La plupart de ces tumeurs expérimentales portent des Ag
qui joueraient un rôle non négligeable dans le rejet. On peut cependant
imaginer que certains animaux peuvent avoir une formule génétique qui ne
leur permette pas de reconnaître certains antigènes et il est possible
que certaines tumeurs soient alors totalement dépourvues
d’immunogénicité pour leur hôte.
· Par
contre les tumeurs spontanées ne présentent qu’exceptionnellement des
Ag immunogènes chez l’hôte, les Ag de différenciation n’ayant aucune
raison d’être reconnus par l’hôte autologue.
2) Par modulation antigénique :
· Ce
phénomène qui semble cependant rarement en cause est observé avec
certains antigènes comme l’Ag TL. Ces antigènes disparaissent de la
surface de la cellule en présence d’Ac spécifiques et la cellule maligne
peut devenir insensible à l’action des Ac sans que sa croissance soit
modifiée.
3) Par blocage des réactions immunologiques :
· Par des Ac qui gênent l’accès des effecteurs cellulaires aux cellules tumorales cibles,
· Par des complexes Ag-Ac
4) Faiblesse des Ag de tumeurs et retard dans l’apparition des R.I :
Ils
semblent constituer le phénomène le plus fréquemment en cause. Il peut
s’agir d’antigènes faibles induisant une R.I. lente et de faible
amplitude, ou d’un antigène fort mais avec une R.I. retardée pour des
raisons inconnues. Dans les deux cas le résultat final est le même,
c’est-à-dire que quand les cellules effectrices seront à un taux
suffisant, le nombre de cellules malignes sera beaucoup trop élevé pour
que la réaction de rejet soit efficace. Ce mécanisme d’échappement à
l’immunosurveillance peut être dû lui-même à plusieurs circonstances :
· Immunosélection progressive de cellules tumorales de moins en moins immunogéniques,
· immunodépression transitoire ou prolongée de l’hôte,
· développement de cellules tumorales en un lieu inhabituel où elles sont inaccessibles,
· intervention de facteurs inhibiteurs sécrétés par la cellule tumorale.
VI. Les antigènes des tumeurs humaines :
Initialement
ces antigènes ont été mis en évidence par des hétéro-anticorps. Ces
antisérums sont difficiles à préparer du fait de la grande difficulté à
les rendre spécifiques par différents procédés d’adsorption. Beaucoup
d’antigènes ont ainsi été décrit en particulier depuis l’avènement des
anticorps monoclonaux.
1) L’alpha-1 foetoprotéine (a-1FP) :
C’est
un antigène oncofoetal découvert par Abeleev chez la souris porteuse
d’hépatome (cancer primitif du foie) dans leur sérum. C’est un antigène
qui existe aussi dans le sérum de souris foetale, mais qui n’existe pas
dans le sérum de souris adulte normale.
C’est
un antigène de mobilité alpha. Une protéine similaire a été retrouvée
chez d’autres espèces animales porteuses d’hépatome y compris l’homme.
C’est une glycoprotéine de PM :72dDa, ressemblant beaucoup à
l ‘albumine, et donc difficile à séparer. Elle ne présente pas de
réactivité croisée avec l’albumine.
L’a-1FP
est le constituant majeur du sérum au début de la gestation. Vers le
milieu de la gestation, les taux sont stationnaires alors que l’albumine
augmente. Vers la fin de la gestation et à la naissance, elle chute
pour disparaître totalement ou ne subsister qu’à l’état de traces. Au
stade précoce de la gestation, elle est synthétisée par le sac vitellin,
puis par le foie foetal. En cas d’agression hépatique avec
régénération, on observe une augmentation du pic des alpha-1 globulines
avec réapparition de synthèse d’a-1FP
a) Rôles physiologiques :
Transporteur d’oestrogènes (chat, souris) et des acides gras (rôle se
rapprochant de celui de l’albumine), d’immunosuppresseur par induction
des lymphocytes Ts
b) Pathologie : Les méthodes de détection et de dosage de l’a-1F sont nombreuses (immunoprécipitation en gel, ELISA, RIA...)
· Association avec hépatomes : Afrique (60 % de positifs), Europe (40 %)
· Tératome malin : cancer du sac vitellin (tumeur embryonnaire)
· Tyrosinose métabolique de l’enfant avec augmentation de l’a-1FP
L’utilisation de méthodes très sensibles, montre toujours des traces d’a-1FP dans le sérum adulte normal avec
une valeur normale supérieure de 10 mcg/ml. Par ces méthodes, beaucoup
de maladies non cancéreuses comme les hépatites, les cirrhoses montrent
une augmentation des taux d’a-1FP (200 à 30 mcg/ml) de même que les hépatomes. Mais il faut savoir qu’il peut exister des hépatomes avec taux normaux d’a-1FP.
Dans les tératomes curables, le taux d’a-1FP diminue (il est intéressant dans ce cas de pouvoir doser l’a-1FP).
Le dosage de l’a-1FP
dans le liquide amniotique présente un grand intérêt pour le diagnostic
prénatal d’anencéphalie ou de spina bifida, où dans certains pays elles
auraient une incidence familiale.
2) Antigène carcino-embryonnaire (CEA) :
Cet antigène a été découvert par Gold et Freedman dans des extraits de tumeurs intestinales : c’est
un Ag présent dans les épithélioma glandulaire du tube digestif
(estomac, colon, pancréas) et leurs métastases. C’est aussi un Ag
présent dans l’intestin foetal, mais absent des muqueuses intestinales
normales de l’adulte. Le CEA peut être aussi retrouvé dans la muqueuse
colique de sujet non cancéreux.
Il
a été également retrouvé au niveau des poumons, des glandes mammaires
et de leurs cancers. Cependant, on retrouve beaucoup plus de CEA dans
les tumeurs digestives que dans les tumeurs des autres organes. On
retrouve également le CEA, en quantité importante dans le kyste de
l’ovaire, dans les cancers médullaires de la thyroïde. Ce qui signifie
que le CEA n’a pas de spécificité d’organe.
Le
CEA est un antigène sécrété. C’est une glycoprotéine très riche en
sucre (50 %), d’un PM de 200 kDa, de mobilité électrophorétique
dispersée, le plus souvent en bêta.
Par des techniques de dosage très sensibles (RIA, chimiluminescence), son taux est augmenté dans
· 70 - 80 % des cancers du colon
· 80 - 90 % des cancers du pancréas
· 60 - 70 % des cancers de l’estomac,
· 50 % des cancers non digestifs
· Cirrhoses, pancréatites, bronchites chroniques
· Sujets normaux fumeurs.
C’est donc un examen dont la valeur diagnostique est nulle, mais dont la valeur pronostique est confirmée.
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dimanche 3 février 2013
Immunité anti-tumorale
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