dimanche 3 février 2013

Le système du complément ( HCA )


Le système du complément


I. Introduction :
Le complément est un ensemble complexe de protéines dont beaucoup sont des protéases et complète de façon non spécifique les effets immunologiques spécifiques des anticorps.
            C’est à la fin du siècle dernier que BUCHNER et NUTTAL ont découvert le complément. BUCHNER avait désigné sous le nom d’alexine un facteur sérique thermolabile doué d’un pouvoir bactéricide et hémolytique. Le terme de complément a été introduit par EHRLICH et MORGENROTH en 1899 et cette appellation a prévalu par la suite. Des différents travaux de BORDET se dégage la notion de l’existence de deux facteurs sériques dont l’action conjuguée permet la lyse des globules rouges ou des bactéries : l’un thermolabile, présent en permanence dans le sérum indépendamment de toute immunisation : le complément, l’autre, l’anticorps apparaissant après immunisation. En 1901, BORDET et GENGOU mettent au point la réaction de fixation (déviation du complément). A partir de cette date, le complément est devenu un réactif de laboratoire qui a permis l’essor de la sérologie et de l’immunologie. BORDET avait aussi émis l’hypothèse que l’alexine n’est pas une substance unique mais formée de plusieurs constituants, ce qui a pu être démontré par la suite. Les progrès dans la connaissance de ce système ont d’abord été lents à se poursuivre et l’on ne pouvait distinguer en 1940 que quatre composants : C1, C2, C3 et C4. Mais, au cours des 30 dernières années, une véritable explosion des découvertes à permis d’élucider en grande partie la composition exacte de ce système et les mécanismes de son action . Le système du complément est actuellement composé d’une vingtaine de protéines solubles (environ 5% des protéines plasmiques) et membranaires (récepteurs et protéines régulatrices). Ces protéines du complément sont capables de réagir entre elles et avec certaines membranes biologiques. L’activation en cascade de ces différents composés est à l’origine d’activités biologiques essentielles : réaction inflammatoire, phagocytose des micro-organismes, neutralisation des virus, élimination des complexes immuns, présentation des antigènes, régulation de la réponse immunitaire.
La plupart de ces activités dépendent d’interactions entre les protéines du complément et des récepteurs membranaires spécifiques. L’activation est rapide et se fait de façon localisée. Ce qui implique des mécanismes d’amplification et de contrôle efficaces. Le système du complément est, opérationnellement subdivisé en 3 unités :
¨     Deux unités de reconnaissance aboutissant au clivage de C3
¨     Une unité effectrice terminale commune

II. Les protéines du complément :

1) Les protéines de la voie classique :
Les protéines de la voie classique et du complexe lytique sont désignées numériquement de C1 à C9. Les fragments de clivage sont désignés par des lettres minuscules (par exemple C3a, C3b). La lettre i désigne un fragment inactivé après clivage  (par exemple C3bi ou iC3b)
Pour la plupart, il s’agit de Bêta-globulines de PM d’environ 200 kDa, et constitué de 1 ou 2 chaînes polypeptidiques reliés par un pont disulfure, exception pour le composant C4 qui est constitué de 3 chaînes et pour le composant C1 qui est constitué de 3 sous-unités C1q, C1r et C1s où C1q présente une structure unique . IL existe un inhibiteur protéasique de la voie classique inhibant spécifiquement C1r et C1s qu’on désigne par C1INH. Le C3 possède la concentration sérique la plus élevée, soit 1200 mg/L

2) Les protéines de la voie Alterne :
Ces dernières sont désignées par des lettres capitales : P (properdine), facteur B (C3 pro-activateur ou C3PA) et facteur D (C3 pro-activateur convertase ou C3PA convertase). La voie alterne permet de cliver directement C3 en C3b indépendamment de la voie classique. C3b est à la fois un produit et un facteur de cette boucle d’amplification. Les protéines de la voie alterne sont des bêta-globulines de PM compris entre 100 et 200 KDa sauf pour le facteur D qui est une sérine-estérase d’un PM de 25 KDa.
Il existe 2 protéines inhibitrices : 1H et C3INH, parties intégrantes de cette voie et jouant un rôle de premier plan dans le clivage de C3.
Les protéines du complément ont spontanément tendance à former des complexes multimoléculaires. C’est le cas pour C1q, C1r et C1s en présence d’ions Ca++, pour C4 et C2 d’une part et C3 et facteur B d’autre part, en présence d’ions Mg++ et enfin pour les composés C5, C6, C7, C8 et C9 dont l’assemblage amène la formation du complexe d’attaque membranaire. Cela suggère que les complexes ainsi formés vont fonctionner comme des sous unités fonctionnelles.

3) Sites labiles de liaison aux membranes :
Le complément a la propriété très particulière de se déposer à la surface de particules activatrices biologiques (complexes antigène-anticorps, cellules, bactéries, virus, parasites...). Ce transfert de protéines plasmatiques sur une surface est secondaire à l’activation d’un site de liaison pour des membranes cellulaires. Les facteurs C2, C3, C4, C5 et B après avoir été activés par le clivage présentent durant un temps très court (< 10 millisecondes) un site de liaison à des membranes (cas du C3b, du C4b et du C5b) ou à un accepteur protéique déjà fixés sur une membrane (cas C3b pour le facteur B et C4b pour C2a). Si la molécule de C activée ne se fixe pas sur son accepteur en temps utile, elle reste libre dans la circulation où elle est rapidement inactivé. Il existe donc des contraintes spatiales rigoureuses à l’activation du complément.  Le développement de la réaction reste limité au micro-environnement immédiat du site d’activation, ce qui empêche sa dissémination à distance. A cette contrainte spatiale, s’ajoutent des mécanismes de régulation. Les membranes des cellules de l’organisme sont pauvres en sites accepteurs, car des molécules telles que l’acide sialique du glycocalix jouent un rôle protecteur vis-à-vis du dépôt de C3b à la surface. Au contraire, les membranes des micro-organismes ou des cellules animales phylogénétiquement différentes sont riches en sites accepteurs.

4) Synthèse et génétique des protéines du complément :
Les protéines du complément sont synthétisées surtout dans la foie, les cellules épithéliales intestinales et sans les monocytes et les macrophages. La demi-vie de C3, C4 et B est de l’ordre de 24h. Le complément a donc une synthèse rapide qui reflète une consommation permanente. Les composants C2, C4 et B sont codés par des gènes situés à l’intérieur de ceux du CMH, et comme d’autre composés (C3, C6, et C7), font l’objet d’un polymorphisme allotypique. Des déficits héréditaires ont été décrits pour la plupart des composants et pour certains inhibiteurs.

III. La voie classique d’activation du complément :
Cette activation se déroule en cascade. Le premier composé à activité protéolytique clive spécifiquement le 2ème composé. Cette voie est en règle générale activée par l’interaction du C1 (par C1q) avec des complexes Ag-Ac où l’anticorps est une IgM  ou 2 IgG (IgG1, IgG3, moins efficacement IgG2,  liées à l’antigène. Plus rarement cette voie peut être activée par des immunoglobulines agrégées, de l’ADN, la CRP et certains virus.

1) Etape de reconnaissance :
Le composé de reconnaissance de la voie classique est le complexe protéique de C1. Ce complexe est tout à fait particulier et comprend 3 sous-unité protéiques. La première, le C1q, a une structure unique évoquant un « bouquet » de six tulipes avec une portion centrale de structure analoque à celle du collagène fixant le C1r et le C1s et six sous-unité périphériques se liant aux fragments Fc des IgG (domaine C2) et IgM (domaine C4). Son poids moléculaire est de 400 KDa, et est constituée de 18 chaînes polypeptidiques formant 3 sous unités de six chaînes chacune. Chaque sous-unité existe sous la forme de 2 triples hélices peptidiques en forme de Y. C1r et CIs ne se lient pas à l’immunoglobuline. Le C1q est capable d’activer le C1r, en présence d’ions calcium et après fixation aux fragments Fc des immunoglobulines agrégées ou complexées à l’Ag. La seconde sous-unité du C1, le C1r, est activée par une réaction de protéolyse. Le C1r activé clive à son tour le C1s, troisième sous unité du C1 (activation en cascade) en le transformant en C1s activé. C1r et C1s activés sont des estérases à sérine-histidine. C1s est le substrat de C1r. C1s (mais pas C1r) active C4 et C2. Il faut considérer C1q, C1r et C1s comme un système enzymatique engrené.

2) Formation de la C3/C5 convertase :
C1s clive à la fois le C4 et le C2. C1s détache un peptide de 6KDa (le C4a) de l’extrémité    N-terminale de la chaîne alpha de C4 laissant un gros fragment appelé C4b. Cette réaction a lieu dans le plasma, autour du site catalytique de C1s. La réaction est efficace, mais la liaison de C4b aux membranes est faible (<10%). C4b se lie soit au complexe C1qrs, soit à la membrane cellulaire adjacente. Les molécules C4b non fixées s’inactivent dans le milieu par perte de leur sit actif.
C1s clive également le C2 complexé  au C4b en présence de Mg++. Cette réaction a lieu si les complexes de forment près du CIs. Elle donne naissance à un petit fragment C2b libéré dans le milieu environnant et un plus gros fragment C2a qui se joint au C4b pour donner C4b2a ou C3-convertase de la voie classique. C4b2a est instable . Sa demi-vie est de 5mn à 37°C. Le site enzymatique clivant le C3 est porté par le C2a. Le complexe C4b2a clive le C3 en 2 fragments C3b et C3a. C3b se dépose à proximité du site de clivage. Le rendement est faible (<10%). Une molécule de C3b située favorablement se combine avec C4b2a pour donner lieu au complexe protéolytique final C4b2a3b de la séquence complémentaire. Le complexe C4b2a à également la propriété de cliver le C5 à condition que ce dernier lui soit fixé sur une molécule de C3b. Le complexe C4b2a a donc une fonction centrale dans l’activation de la voie classique.

3) Régulation de la voie classique :
La voie classique est soumise à différents mécanismes de régularisation.
·       Le C1 INH inhibe l’activité de C1r et C1s en formant des complexes avec ces enzymes et en les dissociant de C1q. Son absence congénitale est responsable de l’oedème angio-neurotique .
·       La C4bp (C4 binding protein) se lie au C4b et interfère dans la formation de la C3/C5 convertase et permet de ce fait au facteur I (inactivateur de C3b) de cliver et d’inactiver le C4b en le clivant en C4c et C4d.
·       Le C1q INH (inhibiteur de C1q) inhibe l’activation de la voie classique par interaction avec C1q.
·       Enfin la convertase C4b2a est contrôlée par des protéines présentes à la surface de la plupart des cellules, à savoir le DAF (decay accelerating factor ou CD 55), CR1 ou CD 35 et MCP (membrane cofactor protein ou CD46)

IV. La voie alterne d’activation du complément :
Cette voie qui utilise C3 et les facteurs B et D est mise en jeu après contact avec de très nombreuses substances telles que les polysaccharides comme l’inuline et le zymosan, les extrait de levures, les endotoxines bactériennes, les IgA agrégées, les globules rouges de lapin . Elle est facilitée en présence d’anticorps.
Une fois activée, la voie alterne est accélérée par une boucle d’amplification qui aboutit à la formation d’une C3 convertase stabilisée par la properdine P.

1) Formation de la C3 convertase de la voie alterne :
La boucle d’amplification met en jeu 3 des 6 protéines de la voie alterne : C3, B et D. En présence d’ions Mg++ C3b et B forment un complexe bimoléculaire C3Bb. L’enzyme D clive alors le facteur B au sein de ce complexe en Ba soluble et Bb, ce qui conduit à la formation de la C3 convertase C3bBb de la voie alterne dont le site d’action est porté par Bb. Cette convertase C3bBb clive C3, formant de nouvelles molécules C3b capables d’engendrer à leur tour, après réaction avec B et D, de nouvelles convertases alternes. Comme le complexe C4b2a, le complexe C3bBb peut lorsqu’il est fixé à une membrane, cliver le C5 à condition qu’il soit lié à C3b.
S’il n’était pas contrôle, ce mécanisme d’amplification entraînerait rapidement la consommation de tout le composant C3 présent dans le sérum.

2) Régulation de la voie alterne :
Deux protéines régulatrices efficaces contrôlent la boucle d’amplification : Le facteur H et le facteur I.
Le facteur H se lie à C3b de façon compétitive avec B entraînant une dissociation accélérée de la C3 convertase C3bBb qui perd dans son activité. De plus H lié à C3b a un rôle de cofacteur enzymatique pour I, permettant au facteur I de cliver C3b en C3bi, molécule incapable de se lier à B pour former la C3 convertase de la voie alterne.
Le même facteur I dégrade C3bi en C3c soluble et en C3dg puis C3d qui reste fixé à la membrane.
L’importance physiologique de la régulation de la voie alterne est démontrée par l’existence d’un déficit génétique en facteur I se traduisant par une consommation accélérée et totale du C3 circulant. Les protéines membranaires DAF et CR1 contrôlent la C3 convertase alterne C3bBb. Même en présence des protéines de régulation, des molécules de C3b sont produites en permanence en faible quantité. Elles sont rapidement inactivées en solution dans le plasma ou déposées sur une surface cellulaire non activatrice   (GR de l’hôte par exemple). Par contre si elles se lient sur une surface activatrice (des bactéries Gram (-) par exemple), elles deviennent inaccessibles au facteur H et forment une C3 convertase. La boucle d’amplification se forme à la surface de la particule et conduit au dépôt de nombreuses molécules deC3b.

3) Autres mécanismes d’activation de la voie Alterne :
Certaines protéines peuvent activer la voir alterne :
a)   La facteur du venin de cobra (FVC) qui n’est autre que le C3b de cobra, capable de former avec le facteur B humain une C3 convertase (FVC-Bb) insensible à l’action des facteurs H et I
b)  Le facteur néphrétique (C3Nef) qui est un auto-anticorps (IgG) dirigé contre la C3 convertase C3bBb. Le C3Nef stabilise ce complexe et le rend résistant à l’action du facteur H.
c)   La properdine (P) enfin qui stabilise aussi le complexe C3bBb. Bien que très différente, ces trois protéines activent la voie alterne par un même mécanisme : comme les activateurs physiologiques, elles rendent la C3 convertase alterne relativement inaccessible aux protéines de régulation.

V. Voie d’activation des Lectines :
            Cette voie est médiée par une lectine à mannose (mannose-binding lectin ou MBL). Cette MBL se fixe sur son ligand que l’on retrouve sur les bactéries. Il s’agit d’un récepteur carbohydraté spécifique. MBL est associée à 2 protéases MASP1 et MASP2 (mbl-associated sérine-protéases 1 et 2). La fixation de MBL à son ligand microbien induit l’activation de MASP1 et 2. MASP1 et 2 activées, clivent C4 et C2 en produisant C2a et C4b. C4b et C2a forment alors la C3-convertase C4bC2a qui clivera C3. Le complexe MBL et ses protéases fonctionnent comme le complexe C1.

VI. Le complexe d’attaque membranaire :
La cytolyse induite par le complément est entièrement due à l’action du complexe lytique. Celui-ci est constitué de C5, C6, C7, C8 et C9 qui circulent dans le plasma sous la forme de complexes réversibles et inactifs. Après clivage de C5 par la C3/C5 convertase de la voie classique ou alterne, le C5b produit se fixe aux membranes biologiques, C6 et C7 viennent ensuite s’y ajouter pour former un complexe trimoléculaire le C5b67. En solution le C5b67 a une demi-vie de quelques secondes, mais peut se fixer sur n’importe quelle double couche lipidique proche. Une foie lié à la membrane, C5b67 peut réagir avec C8 et C9 et donner lieu à une complexe très stable le C5b6789 qui s’insère dans les membranes phospholipidiques en créant des lésions particulières visibles en microscopie électronique (trous de 10 nm de diamètre) qui désorganisent la membrane lipidique et perturbent les échanges avec le milieu extérieur.
Le complexe C5b67 peut se fixer, grâce à sa durée de vie de 30 secondes environ, à des membranes de cellules n’ayant pas participé à l’activation initiale du complément (lyse réactionnelle de  cellules inocentes).
L’activité du complexe d’attaque membranaire est inhibée par les mécanismes d’exocytose et d’endocytose (plus efficace pour les cellules nucléées que pour les globules rouges) mais aussi par des protéines comme la protéine S ou vitronnectine plasmatique, les protéines HRF (homologous restriction factors) liés à la couche lipidique par un pont phosphatidyl-inositol-glycane (PIG ou CD59 = protectine HRF20) et la protéine de liaison de C8, la C8bp.

VII. Protéines régulatrices des membranes et récepteurs cellulaires :
1. Le DAF (decay accelerating factor = CD55) est une protéines liée aux lipides membranaires par un pont PIG (phosphatidyl-inositol-glycane) qui permet des mouvements rapides sur la surface cellulaire. Le DAF est présent sut toutes les cellules sanguines, les cellules endothéliales et épithéliales. Il dissocie les C3-convertases de manières très efficace et constitue un système de protection intrinsèque contre l’activation du complément par les cellules autologues.
2.   Les MCP  (membranes cofactor proteins = CD46)  sont  présentes  sur  les membranes  des  cellules autres que les hématies. Elles fixent C3b et C4b, et favorisent leur inactivation. Ce sont des cofacteurs de I dont le rôle s’ajoute à celui du DAF.
3.   Le CR1 (récepteur du complément de type 1= CD35), lie les fragments C3b et C4b. Outre sa fonction de récepteur, il a la capacité de dissocier les convertases et joue un rôle de cofacteur de I pour le clivage de C3b et C4b. Il est situé sur les hématies, les monocytes, les PN et PE les cellules K, les Ly T et B, les podocytes glomérulaires. Le CR1 participe également à la phagocytose des particules opsonisées et permet au GR d’assurer le transport des complexes Ag-Ac vers les macrophages de la rate et du foie.
4.   Le CR2 (CD21) se lie au fragment C3d ; il est exprimé sur les Ly B, certains Ly T et les cellules dendritiques folliculaires. C’est aussi le récepteur du virus d’Epstein-Barr (EBV). La molécule CD21 possède d’autres ligands qui lui confèrent un rôle immunorégulateur, en particulier la molécule CD23
5.   Les récepteurs CR3 (CD11b/CD18) et CR4 (CD11c/CD18) appartiennent à la famille des intégrines et fixent C3bi. Le CR3 est exprimé sur les monocytes, les PN et les cellules K, CR4 sur les macrophages tissulaires. CR3 joue un rôle essentiel dans la phagocytose des particules opsonisées par C3bi.
6.   Les petits fragments C3a et C5a (et C4a) sont appelés anaphylatoxines. Ils se lient à des récepteurs sur les monocytes, les mastocytes et les plaquettes et y induisent des signaux chimiotactiques, des signaux d’activation avec libération de médiateurs préformés tels que histamine et enzymes lysosomiales ou néoformés tels que leucotriènes, prostaglandines et cytokines avec comme résultat une augmentation de la perméabilité vasculaire et une réaction inflammatoire.

VIII. Conséquences biologiques de l’activation du complément :

            L’activation du complément donne lieu à la formation de nombreux produits doués d’activités biologiques diverses. Les uns se déposent à la surface des particules activatrices dont ils modifient les propriétés de membranes entraînant la lyse (pour le complexe lytique C5-9) ou la phagocytose (pour le C3b). Les autres produits d’activation, en particulier le C3a et le C5a entraînent une réaction inflammatoire locale. Par ces activités, le complément joue un rôle essentiel dans le système humoral de défense contre les agressions étrangères.

1) Lésions membranaires :
Par l’activation du complexe lytique, le complément entraîne la lyse de différents types de cellules telles que les globules rouges, les plaquettes, les leucocytes, les bactéries et les virus porteurs d’enveloppe lipoprotéique. De plus, certaines bactéries ne sont lysées par le complément qu’en présence de facteurs d’appoint (lysozyme par exemple). Notons que ces lésions sont exclusivement sous la dépendance du complexe lytique activé C5b6789 et sont donc identiques quelques soit la voie (alterne ou classique) mise en jeu.

2) Interactions cellulaires :

a) Interaction  avec les cellules phagocytaires :
Les monocytes, les macrophages et les polynucléaires ont des récepteurs CR1, CR3 et pour le fragment Fc des IgG (RFcg). L’adhérence et la phagocytose des bactéries recouvertes d’IgG sont favorisées par la fixation du C3b, mais elles surviennent aussi en l’absence de complément. Réciproquement, le C3b, à lui seul, a aussi une action opsonisante. Ce rôle du C3b est particulièrement important au début de la réponse immunitaire, en présence d’IgM non opsonisantes, ou même avant le développement de l ‘immunité spécifique dans les cas des bactéries Gram négatif qui l’activent directement la voie alterne. L’importance de l’opsonisation par le C3b est également démontrée par la gravité et la fréquence des infections chez les rares malades atteints de déficits en C3, ainsi que ceux atteints de déficit en CR3.

b) Interaction avec les lymphocytes :
Les lymphocytes B ont des récepteurs CR1 et CR2. Ils sont distincts des autres constituants de membrane connus (RF complexes immuns). Une faible densité en CRI pourrait ainsi favoriser les  maladies avec complexes immuns circulants comme le lupus érythémateux disséminé.

c) Rôle dans l’inflammation :
    De nombreux produits d’activation des protéines du complément peuvent provoquer ou amplifier les processus inflammatoires. Les plus étudiés et les plus puissants de ces produits à action pro-inflammatoire sont le C3a et le C5a.
    Les anaphylatoxines C3a et C5a ont des propriétés communes. Elles dérivent toutes les deux par clivage de leurs précurseurs respectifs C3 et C5. Elles ont un PM analogue de l’ordre de 10 KDa, et sont composés d’acides aminés dont les séquences présentent des homologies entre elles. Ces deux peptides ont en position carboxy-terminale, une arginine qui est essentielle à leur activité biologique. Elles provoquent une libération d’histamine par les mastocytes et les basophiles et une contraction des muscles lisses. Injectées par voie intra-musculaire, elles entraînent un érythème et un oedème localisés.
    En revanche, les deux anaphylatoxines diffèrent par certains caractères. Le C5a est vingt fois plus actif que le C3a. Le C5a exerce en plus un effet chimiotactique sur les polynucléaires et entraîne une libération des enzymes lysosomiales par ces cellules.
    Les anaphylatoxines sont inactivées par la carboxypeptidase B sérique qui libère l’arginine terminale. En perdant sont arginine terminale, le C3a perd toute activité, alors que les C5a garde, quant à lui, sont activité chimiotactique.

d) Autre activités biologiques du complément :
     L’activation   des   composés  précoces  de  la  voie  classique  (C1,C4)    neutralise  certains  virus.  L’activation du complément par certains complexes entraîne leur solubilisation. Enfin, il existe des interrelations entre le système du complément et celui de la coagulation : la plasmine active le C1s et le C3 et le C1INH inhibe, outre le C1r et C1s, le facteur de Hageman activé, le facteur XI activé, la kallicréine et la plasmine.

IX. Mécanismes d’échappement :
La composition de la paroi bactérienne détermine les conditions d’activation du complément (voie classique, voie des lectines ou voie alterne)  et l’effet bactériolytique du complexe d’attaque membranaire (sensibilité ou résistance à la bactériolyse en présence de sérum, les souches résistantes ne pouvant être détruites que par opsonisation et phagocytose). Les lipopolysaccharides (LPS) des bactéries Gram (-) activent le C1 par leur lipide A (souches rugueuses ou rough) et la voie alterne (souches lisses ou smooth) par leur chaîne polyosidique. La longueur des chaînes et le type des sucres détermine l’ancrage de C3b et l’hinibition de la fixation des protéines régulatrices H et I.
L’encapsulation des bactéries Gram (+) ou Gram (-) est l’un des mécanismes de résistance au complément. Les capsules riches en acide sialique empêchent l’activation de la voie alterne. La destruction des bactéries encapsulées (ex. méningocoques, pneumocoques, klebsiella pneumoniae, Haemophilus influenzae...) nécessite en général la production d’anticorps spécifiques activant la voie classique. D’autre mécanismes de résistance ont été développés par certains micro-organismes : structure pariétale qui empêche l’insertion stable des complexes d’attaque membranaire, sécrétion de protéines solubles qui fixent C3b à distance de la bactérie, clivage protéolytique des composés liés à la membrane (C4b, C3b), surface externe empêchant l’accès des récepteurs CR3 au C3b lié à la paroi.

X. Exploration du système du complément :
L’étude des nombreux composants du complément peut être faite globalement en évaluant la capacité du sérum à lyser des globules rouges recouverts d’anticorps ou de façon analytique par le dosage de chacun de ses composants.

1) Conditions de prélèvement :
L’étude est faite sur la plasma-EDTA ou sur le sérum. L’échantillon doit être rapidement acheminé au laboratoire. (Dans les trois heures qui suivent le prélèvement). Si l’examen doit être différé, le sérum doit être conservé à -70°C.

2) Méthodes de mesure :

a) Dosage fonctionnels :
            Ils mesurent l’activité hémolytique de la voie classique ou CH50 (quantité de sérum nécessaire pour la lyse de 50% des hématies recouvertes d’anticorps). L’activité de la voie alterne peut être évaluée par     l’AP 50 qui mesure la capacité du sérum à lyser  les globules rouges de lapin qui activent la voie alterne chez l’homme. On peut ainsi doser isolément chacun des composants du complément en ajoutant un excès d’un sérum déficient pour le composant à doser.

b) Dosages immuno-chimiques :
Ils permettent de déterminer les concentrations des composants C1q, C3, C4 et de B (Mancini, néphélométrie laser)

c)  Résultats :
Les valeurs de la CH50 et des différents composants sont variables d’un laboratoire à l’autre et doivent être interprétés en fonction des résultats normaux fournis par le laboratoire.
·       Une augmentation du taux sérique du complément s’observe au cours des diverses affections inflammatoires ou infectieuses : rhumatisme articulaire, arthrite rhumatoïde, périatérite noueuse etc...
·       Une hypocomplémentémie peut survenir dans différentes situations. Elle correspond rarement à un déficit génétique, mais plus souvent à un excès de catabolisme. Une diminution du taux des composants de la voie classique (C1, C4, C2, C3) est habituellement observée dans le lupus érythémateux disséminé, la maladie sérique aiguë, de nombreuses maladies avec complexes immuns circulants et dans les cryoglobulinémies  mixtes.
Une diminution du taux de C3 et du facteur B sans abaissement  de C1 et C4 se rencontre au cours des activations de la voie alterne en particulier lors des glomérulonéphrites membrano-prolifératives et des septicémies à germes Gram -.
En présence d’une hypocomplémentémie persistante confirmée par au moins deux dosages, on recherchera un déficit congénital.

XI. Les déficits congénitaux :
Les déficits en C1q, C2 et C4 s’accompagnent souvent de maladies auto-immunes en particulier de lupus érythémateux (déficit en C2 et C4) ou de syndrome de Gougerot-Sijören, diabète insulino-dépendant, hépatite auto-immune (déficits en C4). Ces déficits sont fréquents : Le déficit en C2 concerne 0,6% de la population caucasoïde (36 homozygotes pour 100 000) ; les déficits en C4 affectent 10 à 25% de la population.
Les déficits en MBP (0,6% de la population) entraînent des infections graves et récidivantes chez les nourrissons et parfois chez l’adulte. Les déficits en C3, B et properdine entraînent des infections bactériennes récidivantes. Les déficits en C5, C6, C7 ou C8 s’accompagnent d’infections par Neisseria spp.
L’oedème angioneurotique transmis sur le mode autosomique dominant, s’accompagne d’une diminution soit pondérale (85% des cas), soit fonctionnelle (15% des cas) de l’inhibiteur de C1. Ce déficit toucherait un sujet sur 150 000. Il se caractérise par des oedèmes post-traumatiques récidivants et des crises douloureuses abdominales. L’atteinte des muqueuses respiratoires entraîne un oedème de la glotte responsable d’asphyxie parfois mortelle. Ces malades présentent un effondrement des taux de C4 et C2. Le C1INH peut être apporté de façon temporaire par perfusion de C1INH purifié en cas de traumatisme ou d’intervention chirurgicale. Le traitement par les androgènes est efficace chez la plupart des patients en augmentant la synthèse de C1INH
Les déficits en facteurs H ou I s’accompagnent d’infections récidivantes et parfois d’urticaire, d’anémie hémolytique et de glomérulonéphrite. Les taux de C3 sont effondrés.
Les déficits en DAF et autres inhibiteurs du complexe d’attaque membranaire fixés à la membrane lipidique par liaison glycophospholipidique sont à l’origine de l’hémoglobinurie paroxystique nocturne, avec augmentation de la susceptibilité des hématies à la lyse par le complément.
Les déficits en CR3 (leucocyte adhésion deficiency) entraînent des infections sévères.
Un déficit d’expression de CR1 sur les hématies existe dans certaines maladies auto-immunes (origine génétique ?)

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